La question des démolitions à la Villeneuve est ancienne. A la fin des années 80, alors qu’émergeait le quartier Vigny Musset, le corrompu Alain Carignon avait envisagé un projet de démolition du 50 Galerie de l’Arlequin.
Ce projet avait été vivement combattu par des habitants du 50 Galerie de l’Arlequin au cours de la campagne pour les élections municipales de 1995. Le candidat socialiste Michel Destot s’était alors positionné contre les démolitions et avait remporté l’élection.
Le projet de démolition est ressortit suite au schéma directeur des quartiers sud élaboré par Yves Lion. Ce document envisageait une transformation de la Villeneuve de Grenoble dans le but de valoriser l’ensemble des terrains situés dans les quartiers sud, aux cotés d’autres opérations telle que la transformation du cours de l’Europe.
Toutefois, la transformation opérationnelle de l’Arlequin avait été confiée à une équipe d’urbanistes et d’architectes Interland et Lacaton et Vassal qui avait conclu qu’il ne fallait pas démolir de logements à l’Arlequin mais au contraire mener des réhabilitations ambitieuses des logements. Il s’agissait à la fois de respecter le choix l’avis de nombreux habitants et respecter un patrimoine historique.
Mais la conclusion de leur étude a été remise au cours de l’été 2010 qui a été marqué par une émeute suivi du discours de Grenoble de Nicolas Sarkozy. A la rentrée, les élus de l’époque ont décidé de mettre fin au contrat avec les urbanistes sans diffuser le résultat de leurs études.
Ils ont alors confié leur étude la rénovation de Villeneuve à l’urbaniste en chef Yves Lion qui a proposé un projet de rénovation urbaine axé sur la démolition du 50 Galerie de l’Arlequin et la réhabilitation du 40 et l’autre partie du 50.
Les habitants se sont alors mobilisés dans un premier collectif contre les démolitions avant de proposer à la population des Atelier Populaire d’Urbanisme (APU). Si les mobilisations de ces années là, n’ont pas sauvé le 50 Galerie de l’Arlequin, ils ont permis de mettre la question de la rénovation urbaine de la Villeneuve au cœur de la campagne des élections municipales de 2014.
Le rassemblement des élus des citoyens, de gauche et écologiste s’est alors déclaré clairement contre les démolitions, pour la co-construction et le pouvoir d’agir des habitants. Ils ont été élus avec beaucoup de voix de la Villeneuve
Au lendemain des élections municipales de 2014, certains aspects du projet de rénovation urbaine ont été abandonnés grâce à la mobilisation des habitants, notamment la démolition d’une partie du 130 Galerie de l’Arlequin.
Une semaine de la co-construction a été co-organisée pour élaborer le nouveau projet de rénovation urbaine de la Villeneuve qui a rassemblé plus de 500 personnes. Au cours de cette semaine, il a été clair que les immeubles de l’Arlequin devaient être tous réhabilités, sans aucune démolition.
Grande a été la surprise lorsque les habitants ont appris en décembre 2016 que le nouveau projet de rénovation urbaine finançable par l’Agence Nationale de Rénovation Urbaine incluait la démolition du 10 et 20 galerie de l’Arlequin, ainsi que le 1 place des Saules.
Des habitants ont alors créé un nouveau collectif contre les démolitions pour soutenir les habitants du 10 et 20 Galerie de l’Arlequin dans leurs mobilisations. Ils ont mené une multitude d’action dont des interventions aux ateliers de « concertation » de Passagers des Villes, des interpellations des élus, des conférences de presse, des manifestations, des évènements festifs et militants, une première pétition…
En 2018, ils se sont saisis du dispositif d’interpellation citoyenne mis en place par la ville de Grenoble. En quelques mois, le collectif a réuni plus de 2000 signatures contre les démolitions imposées aboutissant à un débat au conseil municipal. Leurs questions sont restées sans réponse. Pire, la votation citoyenne n’a pas eu lieu suite à l’annulation du dispositif par le tribunal administratif.
C’est à cette époque que l’idée, promue par les Gilets Jaunes, de recourir à un Référendum d’Initiative Citoyenne pour que s’exprime la parole des gens concernés, a eu du succès à Villeneuve.
Quelque soit l’issue de la lutte contre les démolitions du 20 Galerie de l’Arlequin, la mobilisation contre les démolitions de logements sociaux est importante car d’autres immeubles pourraient être menacés à l’avenir, notamment le 70, le 90, le 110 ou 120 Galerie de l’Arlequin.
Le collectif se réunit tous les mercred à 16h ou 18h. Avec le confinement les rencontres dépendent des conditions sanitaires.
e FabLabSud est une plateforme pédagogique et scientifiques pour les étudiants de l’Ecole d’Architecture (ENSAG) et de l’Institut d’Urbanisme et de Géographie Alpine (IUGA).
Enjeux et objectifs :
Enjeux Pédagogiques : Explorer les techniques de protypages, de maquettage et expérimenter les méthodes de fabrication numérique à la frontière entre numérique et analogique.
Enjeux Scientifiques : Renouveler les compétences dans le contexte de la transition numérique et développer des expertises en prise avec la fabrication numérique.
Enjeux économiques : Favoriser l’intégration des étudiants dans le monde professionnel en initiant des croisements et en accompagnant des projets entrepreunariaux.
Enjeux sociétaux : Ouvrir l’université à la société civile et participer à des actions sociales et solidaires en s’inscrivant dans l’histoire et les spécificités du quartier de la Villeneuve.
Créer le 1er écoquartier populaire, telle est l’ambition du projet urbain des Villeneuves à Grenoble et Échirolles porté par les institutions. Ce projet a été discuté avec l’Atelier Populaire d’Urbanisme (APU) lors de la semaine de co-construction en 2015. Malgré les désaccords sur les volets de démolitions, ce projet s’articule autour de huit axes majeurs de développement :
Carte tracée par Jean Lin – Cartes et lignes d’erre, L’Arachnéen, 2013
Présentation : L’approche « Exporterre » vise à repérer, cartographier et fédérer des initiatives, des savoirs faire et des compétences à l’échelle d’un territoire. Cette cartographie est une première étape pour la mise en place d’actions, de rencontres et projets concrets de développement économique, dans le respect des hommes et de l’environnement, pour renforcer l’identité d’un territoire et développer des coopérations extérieures.
The Popular Urbanism Workshop (APU) was created by residents in Villeneuve, Grenoble, to develop a collective alternative to the demolition of social housing and the urban transformation being imposed on their neighbourhood, and to support alternative proposals – proposals that have since influenced urban renewal in the town, and prevented some demolitions.
By developing advocacy activities, intervening in public meetings, challenging the municipal council, and organising press conferences and demonstrations, residents made public their proposals and pressed local institutions to take them into account. And through organizing local assemblies in which residents developed these proposals (disseminating them among technical staff and councillors), and through appearing in local media, residents influenced the debate.
To date, an estimated 500 people or more have been empowered to participate in at least one APU activity in Villeneuve in relation to urban planning. The most significant outcome is the incorporation of many APU proposals in the new urban renewal project, particularly in relation to the environment, education, governance and the economy. APU’s opposition strategy succeeded in preventing the demolition of social housing at 130 galerie de l’Arlequin and led to the creation of a shared garden, Terres Neuves.
« In times of rising right-wing aggressive and regressive politics, the combination of different kind of strategies to both protect and advance social justice issues at local and national level reveals a notable political maturity. The combination of resistance and support to on-going urban struggles, along with awareness raising, capacity-building and collective elaboration of community proposals is highly inspirational. »
Du 22 août au 26 août 2018, à l’occasion de l’Université d’été rebelle et solidaire des mouvements sociaux et citoyens organisée à Grenoble, plus de 300 personnes ont participé au premier Commonscamp rassemblant des militants des communs, du municipalisme et du droit à la ville.
Un an après cet événement fondateur, nous avons le plaisir de vous présenter le webdocumentaire « Faire la ville en Commun » qui retrace les quatre journées du Commonscamp. A travers ce parcours numérique – mêlant textes, photos et illustrations – nous vous proposons de revenir sur cette expérience inédite.
D’une crise à l’autre. De la crise économique de 2008 à la crise de Covid-19. Nous avons subi l’impact des coupes dans les services publics et nous avons vu les communautés et les militants réagir en créant des espaces d’entraide et d’auto-organisation pour prendre en charge collectivement les soins avec une conception inclusive du soin : non seulement en donnant accès aux services et équipements médicaux, mais aussi en offrant une solidarité sous forme de soutien psychologique, de défense contre la violence domestique, pour le logement et le maintien des revenus et pour un accès à la culture.La crise de la COVID-19 n’est pas seulement une crise de santé publique tout comme la crise économique ne sera pas seulement une crise de la dette. Séparer les deux est artificiel. Dans la perspective de l’évènement organisé en décembre 2020, il a été proposé aux participants du projet « Horizon Communs » de présenter des initiatives et de réflexion partagée sur les façons dont les militants se sont organisés en réponse à ces crises. Nous avons essayé de rassembler quelques initiatives menées à Grenoble, plus particulièrement dans le quartier emblématique de la Villeneuve
MARS 2020: Solidarité de voisinage
La pandémie de COVID-19 s’est diffusée en France à partir du mois de mars 2020. Dès la mi-mars, tous les espaces publics ont été fermés pour confiner la population à domicile. La mise en place du confinement coïncidait avec le premier tour des élections municipales. Pendant deux mois, l’accès aux espaces publics étaient très réduits. Cette période a été marquée par une extraordinaire solidarité des habitants et une mobilisation exceptionnelle des services publics, en particulier dans le domaine de la santé.
A Grenoble, la première mobilisation des habitants a porté sur la réouverture des marchés pour assurer l’accès et le soutien aux producteurs locaux de fruits, légumes, œufs… Cette mobilisation s’est d’abord déclenchée sur les réseaux sociaux a été rapidement relayée par le maire de Grenoble qui a obtenue la réouverture des marchés dès la première semaine du confinement.
Des groupes d’entraides se sont mis en place à l’échelle des immeubles, des quartiers et de la ville. L’objectif était d’éviter que des personnes restent isolées, avec une attention particulière aux personnes âgées. Une multitude d’initiatives ont eu lieu : distribution de nourriture, confection de masque en tissu, courses pour des personnes âgées ou en mobilité réduite, soutien scolaire à distance, chorale d’habitants…
AVRIL 2020:Prendre soin de Villeneuve
Durant le confinement, notre espace public a pris d’autres formes. Evidemment, il y avait de nombreux échanges sur internet, mais nous avons remarqué également d’autres initiatives qui utilisaient la fenêtre comme un nouvel espace public. Comme le disait l’architecte Hundertwasser, les habitants ont un droit à la fenêtre.
A Grenoble comme ailleurs en Europe, les habitants se sont positionnés aux fenêtres pour applaudir l’ensemble du personnel de santé, chaque soir à 20h. A la Villeneuve de Grenoble, des habitants et plusieurs musiciens ont chanté tous les soirs à 18h depuis leurs balcons et leurs fenêtres. Cette initiative a été relayée par des médias locaux qui ont permis de diffuser une image positive du quartier. On pouvait entendre des chansons antifasciste comme Bella ciao et des chansons écrites par Marie Mazille et Franck Argentier qui a été fortement diffusé sur les réseaux sociaux.
Au delà de l’idée du « Droit à la Fenêtre », la notion de “prendre soin de notre quartier” a été exprimé comme un Horizon Commun à atteindre pour l’avenir. A partir de ce slogan, une soirée a été organisée pour construire des propositions face à la crise. Il s’agissait de soutenir et amplifier les initiatives d’entraide et de solidarité, de relayer la campagne sur le moratoire des loyers et des charges et de formuler des propositions pour imaginer l’avenir, prendre soin du quartier et favoriser le bien être des habitants dans cette période difficile.Au cours de cette rencontre, les habitants et associations ont pu partager de l’information sur les activités mutuelles.
De nombreuses initiatives de solidarité et d’entraide ont été présenté, par exemple en le soutien à des familles en difficultés oula diffusion d’activités culturelles. Pendant le confinement, Madame Ruetabaga et la Maison des idées ont par exemple réalisé, un petit kit à destination des enfants pour qu’ils produisent des livres. La salle se spectacle, l’Espace 600, a mené un projet intitulé “les personnes au bout du fil” tandis que des personnes du village Olympique ont proposé de réalisé des dessins dans la perspective d’une exposition collective.
MAI 2020: Campagne sur le moratoire des loyers
Tout au long du confinement, des appels à la grève des loyers et des charges se sont multipliés. Le Droit au logement et les fédérations de locataires ont écrit au maire de Grenoble pour demander un moratoire des loyers au maire de Grenoble. Le groupe RIC Arlequin a diffusé le moratoire des loyers auprès de 1000 locataires de l’Arlequin. Par ailleurs, un appel à signature a été diffusé au sein des associations de Villeneuve pour apporter le soutien au moratoire. L’Alliance Citoyenne a mené une démarche complémentaire avec l’envoi d’une lettre aux élues pour demander la réduction et l’annulation des loyers et des charges de façons ciblée sur les familles qui ont des difficultés. Lorsqu’il a été possible de se réunir dans l’espace public, les militants ont organisé des actions. Le samedi 30 mai, une quinzaine de personnes s’est réunie sur la place du marché de la Villeneuve avec un double objectif : parler de la campagne nationale pour un moratoire sur les loyers et donner le coup d’envoi d’une vaste enquête auprès des habitants de l’Arlequin sur leur perte de revenus pendant le confinement.
Comme l’a précise Raphaël Beth dans un article publié dans le Crieur de la Villeneuve : « Les bailleurs sociaux ont ouvert des démarches, au cas par cas, en cas de difficulté pour payer le loyer. Or, il faut pouvoir prouver sa perte de revenus pour bénéficier d’une aide. Quand ce sont des revenus informels, ce n’est pas possible de le faire. L’enquête, via des questionnaires à remplir, pourra montrer l’ampleur de la perte de revenus des locataires.» (Voir https://www.lecrieur.net/une-enquete-sur-les-pertes-de-revenu).
JUIN 2020:Plaidoyer pour le Droit à la Ville
Lors du premier tour des élections municipales en mars 2020, des organisations d’habitants de Grenoble, Lyon et Marseille ont initié la campagne « L’Agenda pour le Droit à la Ville » qui a permis de rassembler 350 propositions. La fin de cette campagne de plaidoyer avait été marquée par la mise en place du confinement qui coïncidait avec le premier tour des élections municipales. Pour le second tour qui se déroulait le 28 Juin, les organisations d’habitants ont décidé de mener une nouvelle campagne de plaidoyer pour mettre en débat nos revendications pour la construction d’un agenda pour le droit à la ville. Pour répondre à cette crise, deux ensembles de propositions semblaient prioritaires :
– Un plan d’urgence pour le logement et la ville
la suspension du loyer et des charges pour les familles en difficulté ,
l’interdiction des expulsions sans solution de relogement
un fonds de compensation pour les bailleurs et les services publics locaux impactés.
Ces mesures d’urgence sont à intégrer dans un plan exceptionnel pour le logement et la ville co-construit avec les habitant-e-s, dans le respect des règles environnementales, visant à
Inscrire l’objectif de 30% de logements sociaux pour 2030 dans le Plan local de l’habitat et à l’échelle des quartiers pour lutter contre la ségrégation urbaine,
augmenter substantiellement le nombre de place en hébergement pour répondre à l’objectif zéro personne à la rue.
– La démocratisation de la fabrique de la ville
Depuis des années, les organisations d’habitant-e-s exigent d’être associées à la fabrique de la ville. Malgré la réforme de la politique de la ville en 2014 qui a introduit le principe de co-construction, les changements concrets se font toujours attendre.
Pour remettre les habitants au centre de ces projets, nous demandons de:
Ouvrir à tous les citoyens et leurs représentants les instances techniques et politiques des projets urbains pour assurer la transparence de l’action publique et la véritable co-construction des projets.
Instaurer des instruments de démocratie directe, tel le référendum d’initiative citoyenne, pour favoriser l’expression réelle des premiers concernés.
Mettre en place des moyens financiers spécifiques, tels le fonds d’initiative citoyenne ou le 1% citoyenneté, pour doter les habitants des moyens nécessaires à une expertise indépendante et à la reconnaissance de leurs savoirs d’usage
Démocratiser le fonctionnement des bailleurs sociaux à travers la gestion urbaine de proximité et la co-construction des opérations de réhabilitation.
Réformer l’agence nationale de rénovation urbaine à partir d’un projet de loi pour renforcer la mise en œuvre de l’agenda pour le droit à la ville (voir annexe).
JUILLET & AOUT 2020: Réappropriation de l’espace public
Après ces longues semaines de confinement, tout le monde avait le désir de passer tout l’été au grand air, de discuter avec ses voisins à l’ombre d’un arbre, se détendre quelques heures et retrouver sa liberté !
Comme chaque année, un collectif d’association a propose de se rassembler autour du petit lac de la Villeneuve pour se réapproprier l’espace public, pour prendre soin de soi, des autres, de notre quartier, de notre ville. Tout au long de l’été, les associations de Villeneuve et d’ailleurs ont prévu des activités, des ateliers, des contes, des démonstrations, des spectacles, des concerts, une buvette pour se rafraichir et des petits plats à déguster.
Les habitants pouvaient venir seul ou en famille, avec ses voisins de 16h à 21h pour profiter des longues journées, des après-midis ensoleillées et des douces soirées d’été ! Si l’évènement a été un réel succès populaire avec plusieurs centaines de participants, il a également été marqué par plusieurs épisodes de violence. Dès le confinement, les associations avaient alertées sur la montée des violences domestiques qui risquaient de se répercuter sur l’espace public.
La présence des associations et des habitants dans l’espace public a permis de discuter de cette situation et se donner rendez vous à la rentrée pour la quinzaine de la non-violence.
OCTOBRE 2020: Quinzaine de la non-violence
A la rentrée 2020, les habitants et associations de la Villeneuve se sont retrouvés pour la quinzaine de la non-violence organisée depuis plusieurs années. Malgré les contraintes sanitaires qui a provoqué l’annulation de nombreux évènements, il a été possible d’organiser plusieurs initiatives dont une rencontre au café associatif « Le Barathym » visant à formuler des proposition pour réinventer la prévention avec les habitants.
Cette initiative propose de s’inspirer des méthodes du leadership civique de Bogota qui a permis une amélioration spectaculaire de la sécurité de la ville entre 1994 et 2003 (source EFUS.eu). La méthode de Bogota est de promouvoir la culture citoyenne, d’aider à résoudre pacifiquement les conflits entre les personnes, d’aider les groupes les plus vulnérables de la population, réduire les risques de délit et former des acteurs clefs de la communauté à l’élaboration d’une stratégie pour renforcer la participation citoyenne et la prévention.
L’objectif est de s’attaquer aux causes de la violence et de la délinquance. Les facteurs personnels et familiaux, l’exposition à la violence, la précarité du logement, l’environnement, la scolarisation et les conditions locales, et les inégalités constituent tous des facteurs de risque liés à la délinquance, souvent exacerbés par la présence de drogues et d’armes, et le manque de possibilités de réinsertion sociale.
NOVEMBRE 2020: Villeneuve Numérique
Comme lors du premier confinement, la démarche Villeneuve Numérique s’est mise en place pour soutenir les habitants, les associations et collectifs pour continuer leurs activités à distance et soutenir les démarches administratives, etc… Cette démarche a permis de mettre en place des outils numériques libres à disposition d’un groupe de voisin, un comité d’immeuble, une association ou collectif. Les habitants pouvaient créer des dossiers partagés sur un nuage dédiée à la Villeneuve pour partager des document collaboratifs, partager des comptes-rendus et d’autres documents. Il s’agissait de voir dans quel mesure les communs numériques pouvaient venir en soutien des communs urbains durant la période de confinement.
NOVEMBRE 2020: Hommage à André Béranger
La crise du COVID est une période qui a été profondément marqué par le décès de membres de nos communauté, soit à cause du virus ou d’autres maladies. Les restrictions sanitaires ont obligé les familles à organiser des célébrations en petit comité. A la Villeneuve, les habitants ont rendu hommage à André Béranger, un pionnier de l’Arlequin, instituteur et militant de la Villeneuve de Grenoble qui a défendu les droits humains tout au long de sa vie, en particulier le droit à l’éducation, le droit au logement et le droit à la ville.
André Béranger était resté fidèle au projet politique de la Villeneuve. Le regard tourné vers l’avenir, il considérait la Villeneuve comme un bien commun à défendre et à transmettre aux prochaines générations en préservant le logement populaire. Il a co-fondé l’association Villeneuve Debout au lendemain de l’été 2010, puis le collectif contre les démolitions et soutenu la mise en place de l’Atelier Populaire d’Urbanisme (APU).
André Béranger demeurera indéniablement une figure majeure de la Villeneuve comme en témoigne l’hommage qui lui a été rendu en plein confinement. La veille de sa mort, des dizaines d’habitants se sont réunis en entonnant des chansons engagés au rythme des percussions, scandant son prénom en apercevant sa silhouette à la fenêtre de son immeuble de la Galerie de l’Arlequin.
Une projection clin d’oeil à André a eu lieu vendredi 27 Novembre sur le 10 Arlequin (où André et Ariane ont habité de 1973 à 1980, juste au dessus de l’école des Charmes) en partenariat avec la Maison de l’image et Vidéogazette (https://www.videogazette.net)
DECEMBRE 2020: Relocalisons !
Le 4 décembre, les membres de l’équipe Exporterre en partenariat avec Transform’ ont lancé l’initiative « Relocalisons ! » qui propose d’imaginer la production locale d’une dizaine d’objets et de services de la vie quotidienne dans l’agglomération grenobloise pour qu’ils deviennent des biens communs. Cette initiative s’inscrit dans la continuité du travail mené par l’équipe Exporterre sur l’économie informelle dans les quartiers populaires.
Alors que dans le contexte de la crise sanitaire, sociale, économique et écologique, la relocalisation se présente aujourd’hui comme une évidence qui s’impose à tous, il s’agit désormais nécessaire de passer de l’idée à sa concrétisation. Cette première rencontre a permis de confirmer l’intérêt des partenaires et commencer à définir une liste d’une dizaine d’objets et de services qui seront travailler ensemble lors d’ateliers participatifs qui se dérouleront de janvier à avril 2021 pour identifier les compétences, réfléchir à l’éco-conception et au cycle de vie des objets et services.
Conclusion : Réflexion sur la santé, la dette et les communs urbains
A partir d’une perspective locale, les liens entre la santé, la dette et les communs urbains paraissent évident. L’enquête sur les impayés de loyers nous a permis de voir que 80% des habitants affirment avoir des difficultés financières depuis le début du confinement et 60% des habitants enquêtés ont subi des pertes de revenus. Il est probable que cette situation entraine une augmentation des dettes et nous savons que les dettes peuvent entrainer une spirale négative aboutissant à la dégradation de la santé. Lors du confinement, des actions de solidarité ont été mené entre voisins, soutenu par des communs numériques. L’idée de prendre soin de son quartier s’est diffusé, dans une vision élargie de l’idée de soin. Lorsque cela a été possible de ressortir au grand air, nous avons lancé des initiatives pour se réapproprier les communs urbains à travers des actions dans l’espace public et organiser des activités culturelles.
Au cours de cette période, certains d’entre nous ont été marqué par le décès de proches. A la Villeneuve, l’instituteur et militant André Béranger est décédé le 15 novembre 2020, au lendemain d’un hommage de ses amis et voisins. Malgré toutes les actions, nous sommes inquiets de l’impact de la crise sanitaire sur la santé des habitants, les difficultés d’accès aux soins et l’aggravation des conditions de vie. Nous constatons que malgré de nombreuses alertes, les bailleurs sociaux n’ont pas mis en place de dispositif spécifique pour aider les locataires qui ont des problèmes de santé. Nous remarquons également que beaucoup d’habitants ne reçoivent pas de réponse à leur demande d’obtenir un logement adapté. Nous sommes inquiets pour les personnes âgées et les personnes isolées. Il est urgent de mettre la santé au centre de nos réflexions, de renforcer la prévention et l’accompagnement des familles dont l’un des membres peut être affectés par une maladie chronique ou grave. Au delà de la solidarité, nous proposons de réfléchir au lien santé et logement à travers une campagne d’interpellation de tous les acteurs : habitants, associations, centres de santé, personnel de santé, travailleurs sociaux service municipal de santé, CHU et les bailleurs sociaux pour réfléchir ensemble à une meilleure prise en compte de la santé des habitants.
Nous ne savons pas si le lien que nous avons fait au niveau local entre la santé, la dette et les communs urbains est transposable à d’autres échelles. Nous avons conscience que la mondialisation néolibérale a provoqué des coupes dans les services publics qui sont de plus en plus affaibli et que nous avons été obligé de nous organiser pour prendre en charge certaines actions. Mais, il est important d’être collectivement vigilant face au probable retour de l’austérité une fois la crise sanitaire terminée. Nous devons également tiré des apprentissages des évènements que nous sommes en train de vivre pour se préparer aux futures crises sociales, sanitaires, financières, économiques et climatiques. Dans ce marasme, nous souhaitons regardez l’horizon qui, nous le souhaitons, sera un Horizon en Commun.
CREDITS : Rédaction : David Gabriel, Next Planning pour l’Assemblée des Communs de Grenoble . Contact : planning@zaclys.net Photos et Illustrations : p2, Benjamin Bultel, www.lecrieur.net ; illustration Next Planning, p4, Benjamin Bultel www.lecrieur.net, illustration Next Planning, p6, photos Villeneuve Plage : Next Planning, p8 : photo APU, anonyme, projection Clin d’oeil à André, photo Willy Lavastre, p9, logo Relocalisons, Next Planning.
Depuis plusieurs mois, l’AITEC et Planning réalisent un état des lieux sur les interactions entre la recherche, l’expertise citoyenne et les mouvements sociaux urbains. L’objectif est de produire une analyse des relations et des apports réciproques entre chercheur.e.s universitaires, académiques, bureaux d’études et mouvements citoyens inscrits dans des actions menées conjointement pour le doit à la ville et le droit au logement.
Cette rencontre d’un jour et demi vise à discuter collectivement cet état des lieux et élaborer ensemble des pistes pour renforcer les mouvements sociaux à partir des coopérations entre chercheurs et militants de terrain des luttes urbaines. La première journée sera consacrée à la présentation de cinq études de cas ponctuée par des discussions collectives. La seconde journée sera consacrée à élaborer des propositions et perspectives pour un agenda de la recherche-action urbaine.
Programme
Vendredi 6 novembre 2020
10h : Accueil et introduction par l’AITEC et PLANNING
10h20 : Intervention de Mohamed Mechmache, Pas Sans Nous
10h40 : La recherche-action avec les militant·es de l’habitat éphémère ou mobile avec HALEM
Présentation des relations entre chercheur·es et militant·es au sein d’Halem qui est une association composée de militant·es, de juristes, de communicant·es, d’usager·es adhérent·es et bénévoles uni·es par le sujet de l’habitat éphémère ou mobile.
11h30 : Recherche-action urbaine à la Villeneuve de Grenoble avec Next Planning
Présentation de plusieurs initiatives réunissant des chercheur·es, des associations et des habitant·es de la Villeneuve de Grenoble qui visent à renforcer la recherche-action urbaine et tentent d’ouvrir de nouvelles perspectives en faveur du Droit à la Ville.
12h20 : Pause
13h45 : Retour sur l’histoire de la recherche-action en dialogue avec le LISRA
Après un retour retrospective sur la recherche-action, nous entamerons un dialogue avec des membres du Laboratoire d’Innovation Sociale par la Recherche-Action (LISRA) vise à revenir sur la pratique des tiers- espaces de l’action et de la recherche.
14h30 : Soutenir les luttes des habitants en région parisienne avec APPUII
APPUII est une association constituée de chercheur·es, professionnel·es, étudiant·es, membres d’associations locales et d’habitant·es qui interviennent à la demande d’habitant·es concerné·es par des projets urbains. En revenant sur l’histoire de ce réseau né d’une recherche-action, nous entamerons un dialogue sur les pratiques et pédagogies coopératives qui contribuent au renforcement des mobilisations des habitant·es.
15h20 : Alliance entre chercheur·es et militant·es dans la coordination Pas Sans Nous
Le collectif Pas sans Nous s’est voulu un syndicat des quartiers populaires en mesure de défendre les droits des habitant·es de ces quartiers soumis à l’arbitraire et à la ségrégation. Nombre d’associations de quartier se sont réunies dans ce collectif, inspirées par du rapport: « Pour une réforme radicale de la politique de la ville – ça ne se fera plus sans nous ». Cette présentation vise à analyser ce que produit la coopération entre chercheur.es et autres professionnel.les et militant.es au sein de cette organisation.
16h10 : Luttes et enquêtes sociales sur la transformation urbaine à Marseille avec Un Centre Ville pour Tous
Depuis une vingtaine d’années, l’association Un Centre Ville pour Tous se bat pour l’éradication du logement indigne et la réhabilitation des quartiers populaires de Marseille. Nous présenterons les pratiques de l’enquête sociale rassemblant des chercheur·es, militant·es et habitant·es au service des luttes urbaines et des pistes possibles pour de nouvelles recherche-action menée avec les habitants.
17h : Retour et synthèses avec le témoignage de François Menard (Plan Urbanisme Construction Architecture)
Samedi 7 novembre 2020
9h-12h : Propositions et perspectives pour la recherche-action urbaine
Après une première journée de présentation des études de cas, nous envisageons un dialogue entre les participants pour débattre des quatre questions posées au départ de la démarche :
Comment interagissent le monde de la recherche et les associations et collectifs d’habitant.es dans la construction des luttes ?
Comment se soutiennent et s’alimentent ces deux acteurs des luttes urbaines : qui sont-ils, quels outils, quels appuis, quels freins ?
Quelles sont les méthodes de recherche-action qui permettent aux organisations d’habitants de réellement participer à la gouvernance de la recherche urbaine ?
Quels sont les savoirs qui émergent des coopérations entre chercheurs et mouvements d’habitants ? Quelles sont les hypothèses de recherche ? Quelles contributions à l’agenda de recherche ?
Ces derniers échanges vise à construire des perspectives pour le renforcement des mouvements sociaux et de la recherche-action urbaine. Comment renforcer les liens entre chercheurs, militants et habitants ? Quels sont les besoins de recherche- action pour les mouvements d’habitants ? Quelles propositions pour contribuer à l’agenda de la recherche-action urbaine ?
Depuis plusieurs mois, l’AITEC et Planning réalisent un état des lieux sur les interactions entre la recherche, l’expertise citoyenne et les mouvements sociaux urbains. L’objectif est de produire une analyse des relations et des apports réciproques entre chercheur.e.s universitaires, académiques, bureaux d’études et mouvements citoyens inscrits dans des actions menées conjointement pour le doit à la ville et le droit au logement.
Ce séminaire de deux jours vise à discuter collectivement cet état des lieux et élaborer ensemble des pistes pour renforcer les recherches-actions du mouvement pour le Droit au logement et le Droit à la ville. La première journée sera consacrée à la présentation de cinq études de cas ponctuée par des discussions collectives. La seconde journée sera consacrée à élaborer des propositions et perspectives pour un agenda de la recherche-action urbaine.
Programme
Vendredi 6 novembre 2020
10h : Accueil et introduction par l’AITEC et PLANNING
10h30 : La recherche-action avec les militants de l’habitat éphémère ou mobile avec HALEM.
Présentation des relations entre chercheur.es et militants au sein d’Halem qui est une association composée de militants, des juristes, des communicants, des usagers, adhérents et bénévoles unis par le sujet de l’habitat éphémère ou mobile.
11h30 : Alliance entre chercheurs et militants dans un syndicat des quartiers populaire avec la coordination Pas Sans nous
La rencontre avec la sociologue Marie-Hélène Bacqué et le militant Mohammed Mechmache pour l’élaboration d’un rapport pour une réforme radicale de la politique de la ville a aboutit à la création de la Coordination Pas Sans Nous qui se défini comme un syndicat des quartiers popuaires. Cette présentation vise à analyser les relations entre chercheurs et militants au sein de cette organisation.
14h : Dialogue sur la recherche-action avec le LISRA
Ce dialogue avec des membres du Laboratoire d’Innovation Sociale par la Recherche-Action (LISRA) vise à revenir rapidement sur l’histoire de la recherche-action et la pratique des tiers-espaces de l’action et de la recherche.
14h30 : Luttes et enquêtes sociales sur la transformation urbaine à Marseille avec Un Centre Ville pour Tous
Depuis une vingtaine d’année, l’association Un Centre Ville pour Tous se bat pour l’éradication du logement indigne et la réhabilitation des quartiers populaires de Marseille. Nous présenterons notamment les pratiques de l’enquête sociale rassemblant des chercheurs, militants et habitants au service des luttes urbaines. Suivi d’une discussion collective.
15h20 : Soutenir les luttes des habitants en région parisienne avec le réseau APPUII
APPUII est une association constituée de chercheurs, professionnels, étudiants, membres d’associations locales et d’habitants qui interviennent à la demande d’habitants concernés par des projets urbains. En revenant sur l’histoire de ce réseau né d’une recherche-action, nous entamerons un dialogue sur les pratiques et pédagogies coopératives qui contribue au renforcement des mobilisations des habitants
16h15 : Recherche-action urbaine à la Villeneuve de Grenoble avec l’association Next Planning
Présentation de plusieurs initiatives réunissant des chercheurs, des associations et des habitants de la Villeneuve de Grenoble qui visent à renforcer la recherche-action urbaine et tentent d’ouvrir de nouvelles perspectives en faveur du Droit à la Ville.
17h : Synthèse
Samedi 7 novembre 2020
9h-12h : Propositions et perspectives pour la recherche-action urbaine.
Après une première journée de présentation des études de cas, nous envisageons un dialogue entre les participants pour construire des perspectives pour la recherche-action urbaine. Comment renforcer les liens entre chercheurs, militants et habitants ? Quels sont les besoins de recherche-action pour les mouvements d’habitants ? Il y a t-il une demande sociale de recherche-action ? Quelles sont nos propositions pour contribuer à l’agenda de la recherche-action urbaine ?
Ce texte reprend la présentation du groupe de travail « Municipalisme et mouvements sociaux » du réseau intercoll [1].
Listes citoyennes, campagne de plaidoyer, référendum d’initiative citoyenne, confluence de partis, assemblées locales, élections sans candidat… De nombreuses initiatives émergent, à l’occasion des élections municipales de mars 2020, pour une réappropriation du politique par les citoyens. Plusieurs de ces expériences se réclament du municipalisme. Cet article propose une réflexion sur le renouveau du municipalisme, et sur son histoire, par rapport aux débats actuels sur les stratégies de transformation sociale.
Les mouvements sociaux doivent s’intéresser à la question du municipalisme.
Le nouveau municipalisme s’inscrit dans la redéfinition de la place des institutions locales et municipales dans les stratégies de transformation des sociétés. Nous partons d’une approche du nouveau municipalisme comme un ensemble de pratiques politiques et d’actions locales qui visent à la mise en place d’alternatives et d’auto-gouvernement qui partent du local dans une perspective de changement global.
Un retour sur l’histoire du municipalisme permet de remettre en perspective de nombreux débats actuels sur les stratégies de transformation sociale.
Dans toutes les civilisations, les formes de gouvernement relient des sociétés et des territoires historiquement constitués. Le politique naît du gouvernement de la Cité et l’organise. Dans le passage du féodalisme au capitalisme, les villes vont suivre une évolution qui deviendra contradictoire. La ville se libère des liens féodaux et s’érige en commune ; « l’air de la ville rend libre ». Les villes vont inventer la matrice du capitalisme et de la bourgeoisie.
Le débat est très tranché dans la première internationale. Les courants radicaux du municipalisme trouvent leurs sources dans l’histoire révolutionnaire. La transformation d’une ville capitale en « Commune », les territoires libérés pour contester et réinventer les pouvoirs par rapport aux Etats. La référence part de la Commune de Paris mais ne s’y restreint pas. C’est le cas de Petrograd en 1917, Hambourg en 1923, Barcelone en 1937. Une autre approche, « possibiliste », est celle du socialisme municipal qui allie une conception locale du socialisme avec la tradition communautaire communale illustrée par les Chartes locales du Moyen Age et les biens communautaires.
Que peut-on attendre des élections locales et des pouvoirs locaux dans une perspective de transformation sociale radicale ? On peut les considérer comme une étape pour le pouvoir d’Etat, une étape vers le pouvoir national. Progressivement, le gouvernement municipal est apparu comme une réponse à la ségrégation urbaine et au cantonnement de la classe ouvrière et des couches populaires dans les banlieues. Il s’agit alors de rechercher une amélioration des conditions de vie des couches populaires à l’échelle locale à travers, notamment, la maîtrise du foncier, la construction de logement et des services publics municipaux.
Dans la deuxième partie du 20e siècle, à la révolution urbaine liée à l’industrialisation va succéder une nouvelle révolution urbaine caractérisée par la mondialisation financière et néolibérale. L’équilibre des pouvoirs et la place des pouvoirs locaux vont être bouleversés. La décolonisation produit des villes en développement, villes informelles et des quartiers auto-construits.
Dans les années 1980, des pratiques d’autogouvernement à l’échelle communale vont se dégager. Le « municipalisme libertaire » de Murray Bookchin, et l’expérience zapatiste des Chiapas, l’expérience des budgets participatifs de Porto Alegre. D’autres réseaux cherchent à ralentir la ville, à augmenter sa résilience par des relocalisations. Les questions écologiques et démocratiques sont mises en avant.
C’est dans ce contexte qu’a émergé, depuis 2011, « le mouvement des places » dans plusieurs villes du monde. Ce mouvement renoue avec les occupations de place pendant la période 1960-1975, les « mai 68 dans le monde ». En occupant les places, les mouvements réinvestissent le centre des villes. Ils cherchent à se réapproprier les places et à s’installer dans l’espace public. Ce mouvement des places ouvre une nouvelle phase du municipalisme
Le municipalisme participe à une option stratégique face à la mondialisation néolibérale. Une stratégie municipaliste dépend des facteurs propres à chaque territoire. Pour les mouvements sociaux, tout commence généralement par des luttes locales, des actions de plaidoyer et de la construction d’alternatives concrètes. Les villes sont des lieux d’action privilégiée de la lutte contre le changement climatique. Il s’agit également de mettre en œuvre des pratiques démocratiques qui préfigurent les expériences d’autogouvernement à travers des comités de quartier et des assemblées populaires. L’un des enjeux porte sur une réappropriation des communs accompagnée par la mise en place de nouvelles gouvernances des ressources. Toutefois, les expériences municipalistes actuelles doivent prendre en compte les limites de l’action locale, en particulier le poids de la dette et les nouvelles formes de gouvernementalité. L’alliance entre mouvements sociaux et municipalités progressistes constitue une échelle pertinente pour construire des alternatives locales et utopies concrètes qui résistent à la marchandisation, la financiarisation et aux replis identitaires.
Le municipalisme permet d’envisager une transformation de « l’intérieur » et de « l’extérieur » des institutions en constituant des alliances et d’éventuelles plateformes. D’une part, le municipalisme permet d’approfondir les pratiques nécessaires d’organisation de quartier, de construction d’alternatives locales et d’autogestion. Cet enracinement local permet de reconstruire des bases sociales indispensable à tout mouvement social. D’autre part, le municipalisme permet d’envisager une transformation des politiques publiques locales qui tend vers des formes d’autogestion et d’autogouvernement. Ces enjeux de démocratie locale participent également à une redéfinition des notions de citoyenneté au-delà sans se limiter à l’échelle « nationale ».
La dimension internationale du nouveau municipalisme se retrouve dans le mouvement altermondialiste et dans les forums des autorités locales et le forum des autorités locales de périphéries qui ont accompagné les forums sociaux mondiaux depuis 2001. Par rapport aux associations internationales de villes, et notamment à Cités et Gouvernements Locaux Unis, qui en est la plus importante ; les réseaux de villes internationaux mettent en avant le droit à la ville et le choix pour une ville solidaire par rapport à la ville compétitive. Ils mettent aussi en avant l’alliance entre les autorités locales et les mouvements sociaux et citoyens.
Ce sont les réseaux internationaux de villes qui permettent d’élargir la vision et l’action des municipalités et du municipalisme. Les réseaux de ville internationaux, et aussi par grandes régions ou nationaux, permettent de resituer le local dans des approches plus larges. Ils combinent la définition d’alternatives à partir de la diversité des situations et la popularisation des propositions. L’identification des réseaux permet d’explorer les dimensions d’un programme alternatif : villes contre la dette ; le libre échange (TAFTA et CETA) ; eau ; accueil des migrants ; …
Dans un réseau il y a des villes associées qui résistent et élargissent (par exemple pour le réseau des villes hospitalières, les villes qui se contentent de se déclarer villes hospitalières) et des villes motrices qui définissent les alternatives (égalité des droits et citoyenneté de résidence)
Le municipalisme s’inscrit dans une démarche stratégique, dans l’articulation entre urgence et alternative. Dans l’urgence, les municipalités peuvent être les points d’appui des résistances par rapport aux contradictions à partir de l’orientation des services publics, des marchés publics et de l’emploi, de la citoyenneté de résidence, de l’égalité, du développement local, etc. L’inscription de ces actions dans la définition d’un projet alternatif est nécessaire pour lui donner un sens, y compris pour résister. Ce projet est celui de la transition, au sens donné auparavant, sociale, écologique et démocratique. Il se cherche à travers de nouveaux concepts, de nouvelles notions : le bien commun, la propriété sociale et collective, le buen vivir, la démocratisation de la démocratie, …
L’alliance stratégique est à construire entre les institutions locales et les mouvements sociaux et citoyens (appellations plus précises que celles de sociétés civiles ou d’associations). Elle permet d’envisager un renouvellement de l’action politique (exemple de la municipalité de Barcelone et du mouvement En comùn). L’alliance possible avec les acteurs économiques peut concerner les entreprises de l’économie sociale et solidaire, les entreprises municipales, les entreprises publiques, les entreprises locales. Autour du refus du rabattement sur la rationalité dominante « marchandiser, privatiser, financiariser » et de la mise en avant d’une démarche fondée sur le respect des droits fondamentaux.
Il s’agit de redéfinir l’articulation des échelles d’intervention dans le rapport entre les sociétés et les territoires. Au niveau local, la démocratie de proximité, les alternatives locales, les services publics, les territoires. Au niveau national, les politiques publiques, l’Etat, une large part de la citoyenneté. Au niveau des grandes régions, le culturel et la géopolitique. Au niveau mondial, le droit international, les migrations, le climat et l’hégémonie culturelle. Du point de vue des priorités et des formes, l’articulation dépend des situations et des contextes. Les situations locales et nationales gardent leur importance par rapport aux échelles régionales et mondiales.
L’interrogation porte sur la conception de la transition, celle de la priorité quasi exclusive donnée la prise du pouvoir d’Etat pour la transformation des sociétés. Elle dégage le municipalisme et l’économie sociale et solidaire de leur enfermement dans le réformisme et dans l’économie réparatrice. Sans nier l’importance des ruptures, elle rappelle l’importance du temps long. Elle donne une importance nouvelle aux pratiques alternatives et à l’émergence de rapports nouveaux dans la société actuelle.
David Gabriel Bodinier, Magali Fricaudet, Gustave Massiah, Elise Monge
P.-S.
• Ce texte reprend la présentation du groupe de travail « Municipalisme et mouvements sociaux » du réseau intercoll . Il a été rédigé par David Gabriel Bodinier, Magali Fricaudet, Gustave Massiah et Elise Monge